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Yaschar (Sépher Haïyaschar) ou Livre du Juste
Yaschar (Sépher Haïyaschar) ou Livre du Juste

 

Yaschar (Sépher Haïyaschar)
ou Livre du Juste

par
le chevalier Paul L.B. Drach

Une exclusivité de GoDieu.com, 2011

 

Le livre du Juste 04

 

AVERTISSEMENT: Ce n’est pas parce que les Livres de Josué et 2 Samuel contenus dans la Bible réfèrent au «Livre du Juste» qu’il nous faut le considérer inspiré et fiable comme le sont les Livres du Canon des Écritures Saintes, car ce n’est pas le cas, malgré que des scribes hébreux ont un grand respect pour ce livre, — le Sépher Yohar ou Livre des Splendeurs des hébreux le cite à maintes reprises. Nous y trouvons des points qui ont apparence de conflis avec la Bible comme celle dans Genèse 37:28 au sujet de qui tirèrent Joseph de la citerne. De plus, les traducteurs nous déclarent eux-même: «…nous avons pu rectifier les nombreuses fautes typographiques dont elles fourmillent.» Il nous faut aussi retenir que les anciens moines Dominicains ou «Chiens de Dieu», ont falsifié un grand nombre d’anciens documents où des embelissements et des précisions ont dû être ajoutés afin de favoriser les principes du catholicisme romain. Il demeure, tout au plus, une référence intéressante pouvant apporter certaines précisions plausibles.

 

Livre Apocryphe Livre du Juste | Page 4 23 pages


Intro Table 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21    

Section Noé.

En l’année quatre-vingt-quatrième de la vie de Noé, mourut Énos, fils de Seth, âgé de neuf cent cinq ans. Et dans le cent-soixante-dix-neuvième année de la vie de Noé mourut Caïnan, fils d’Énos. Et tous les jours de Caïnan furent de neuf cent dix ans. Et dans la deux cent trente-quatrième année de la vie de Noé mourut Malaléel, fils de Caïnan. Et tous les jours de Malaléel furent de huit cent quatre-vingt-quinze ans. Et Jared, fils de Malaléel, mourut en ce temps-là, dans la trois cent soixante-sixième année de la vie de Noé. Et tous les jours de Jared furent de neuf cent soixante-deux ans.

Il arriva après un grand nombre de jours, en l’année trois cent soixante-sixième de la vie de Noé, lorsque eurent fini de mourir du milieu des hommes tous ceux qui avaient été fidèles à Jéhova, hors Mathusala qui survivait encore, (il arriva) que Jéhova dit à Noé et à Mathusala: Convoquez tous les hommes, et annoncez-leur ces paroles: Voici ce que dit Jéhova: Revenez de vos mauvaises voies, quittez vos œuvres criminelles, et il révoquera la sentence qu’il a prononcée contre la terre, et elle ne sera pas mise à exécution. Je vous accorde, dit Jéhova, encore cent vingt ans pour vous convertir. Noé et Mathusala se levaient tous les jours de grand matin pour exhorter les hommes. Mais ceux-ci détournaient l’oreille de leurs paroles, et demeuraient endurcis.

Or, Noé, fils de Lamech, s’abstenait de prendre femme, car il disait: Puisque Jéhova doit exterminer les hommes de dessus la terre, que me servira d’avoir des enfants? Mais Noé était un parfait juste au milieu des générations perverses de son temps, et Jéhova l’avait choisi pour perpétuer par ses descendants l’espèce humaine sur toute la terre. Jéhova dit donc à Noé: Épouse une femme, car toi et tes enfants vous serez conservés sur la terre. Noé alla et fit choix de Noéma, fille d’Hénoch (1165), et elle était âgée de cinq cent quatre-vingts ans. Noé, lorsqu’il l’épousa, était âgé de quatre cent quatre-vingt-dix-huit ans. Elle conçut et enfanta un fils, et Noé le nomma Japheth, disant: Que Dieu me répande par ma postérité sur la terre. Elle conçut de nouveau et eut un fils, et Noé le nomma Sem. disant: Dieu m’a mis en état de conserver la vie sur la terre (1166). Noé avait cinq cent deux ans quand Noéma mit au monde Sem. Les garçons grandissaient, et marchaient dans les voies de Jéhova, selon tout ce que leur avaient enseigné Mathusala et Noé leur père. En ce temps-là mourut Lamech, père de Noé, dans la cinq cent quatre-vingt-quinzième année de Noé. Mais il n’avait pas marché de tout son cœur sur les traces de son père. Et tous les jours de Lamech furent de sept cent soixante-dix-sept ans. Jéhova dit alors à Noé et à Mathusala: Levez-vous et criez de nouveau aux oreilles de tous les hommes les paroles que déjà une fois j’ai mises dans votre bouche. Ils se levèrent et firent comme Jéhova leur avait commandé. Mais les hommes ne voulurent pas les écouter. Après cela, Jéhova dit à Noé: La fin de toute chair est arrivée devant moi; je vais tout exterminer avec la superficie même de la terre. Maintenant, prends du bois de cyprès et va vers tel endroit (1167), et construis-toi une grande, arche que tu monteras en cet endroit-là. Tu lui donneras une longueur de trois cents coudées, une largeur de cinquante coudées et une hauteur de trente coudées. Et tu y feras une porte ouvrant sur le côté, et la rétréciras vers le sommet jusqu’à la largeur d’une seule coudée. Tu l’enduiras de poix en dedans et en dehors. Car voici que je vais amener un déluge d’eau pour faire périr toute chair d’au-dessous du ciel. Et tu entreras dans l’arche, toi et ta famille, et tu y réuniras de tous les êtres vivants par couples, mâle et femelle, afin d’en conserver les espèces sur la terre. Tu feras aussi dans l’arche provision de tout ce que mangent les bêtes. Va choisir, pour les marier à tes fils, trois jeunes filles.

Noé se leva et construisit l’arche conformément à tout ce que Jéhova lui avait commandé. Il la commença dans sa cinq cent quatre-vingt-quinzième année, et dans sa six-centième année il la termina dans tous ses détails. Il donna pour femmes à ses fils les trois filles d’Éliacim, fils de Mathusala, selon ce que Jéhova lui avait ordonné. En ce temps-là mourut Mathusala, fils d’Hénoch, âgé de neuf cent soixante-neuf ans.

Après la mort de Mathusala, Jéhova dit à Noé: Entre dans l’arche avec tous les tiens. Et voici que je vais assembler vers toi tous les animaux de la terre, les bêtes des champs et les oiseaux du ciel: tous arriveront autour de l’arche. Alors tu en sortiras et te tiendras sous la porte, et tu livreras entre les mains de tes fils, pour l’introduire dans l’arche, toute bête qui s’avancera d’elle-même et s’accroupira devant toi; mais tu laisseras dehors toute bête qui restera debout devant toi. Et dès le lendemain, Jéhova amena autour de l’arche un nombre immense de toutes sortes de bêtes; et Noé, se tenant sous la porte, exécuta la chose qui lui avait été prescrite. Il fit entrer dans l’arche deux individus de chaque espèce, un mâle et une femelle, mais sept individus des bêtes et des oiseaux purs (1168). Or, une lionne s’avança avec ses deux lionceaux, un mâle et une femelle, et tous trois s’accroupirent devant Noé. Soudain les deux lionceaux se relevèrent et se jetèrent sur la lionne et la maltraitèrent, et elle s’enfuit au milieu des autres lions. Les lionceaux revinrent et s’accroupirent devant Noé, qui, frappé de ce fait, les fit entrer dans l’arche. Et les autres quadrupèdes et oiseaux continuaient à stationner en ce lieu-là, tout à l’entour de l’arche. Pendant sept jours, la pluie n’arrivait pas encore; mais Jéhova effrayait le monde par un ouragan véhément, par l’obscurcissement du soleil, par des éclairs et des tonnerres, et il ébranlait la terre en secouant ses fondements, et ses habitants en étaient terrifiés. Or, Jéhova voulait par ces épouvantables phénomènes, intimider les hommes et les ramener à lui; mais ils ne rentraient pas en eux-mêmes, et continuaient à l’irriter.

Et il arriva au bout de sept jours, en la six-centième année de Noé, que les eaux du déluge se répandirent sur la terre, toutes les sources de l’abîme firent irruption sur la terre en la perçant, et les cataractes du ciel s’ouvrirent largement. La pluie dura sur la terre quarante jours et quarante nuits. Mais Noé et sa famille et tous les êtres vivants qu’il avait avec lui, étaient entrés dans l’arche pour se garantir des eaux du déluge, et Jéhova en avait fermé la porte sur eux. Tous les autres hommes, molestés par la pluie, car les eaux croissaient considérablement, s’attroupèrent au nombre d’environ sept cent mille, des deux sexes, et vinrent tous auprès de l’arche. Et ils crièrent à Noé, disant: Ouvre-nous, afin que nous entrions. Pourquoi veux-tu que nous mourions? Il leur répondit de l’intérieur de l’arche, en élevant la voix: N’est-il pas vrai que vous avez été rebelles à Jéhova? Vous avez même dit: Il n’existe pas. C’est en punition de vos crimes qu’il vous accable de ce désastre afin de vous exterminer de la surface de la terre. N’est-il pas vrai que je vous ai prêché cette chose pendant ces cent vingt ans passés? Vous n’avez pas voulu écouter la voix de Jéhova, et maintenant vous avez souci de conserver votre vie. Et tous répondirent à Noé: Nous voici, nous revenons à Jéhova; de grâce, ouvre-nous, afin que nous ne périssions pas. Noé répondit: Vous ne revenez à Jéhova qu’à l’heure où vous voyez les angoisses qui vous pressent. Que ne vous êtes-vous convertis à lui de bonne volonté pendant le répit de cent vingt ans qu’il vous a donné? Dorénavant, il détournera son oreille de vos cris, et vous ne parviendrez plus à le fléchir (1169). Et ne pouvant plus supporter la violence toujours croissante de la pluie, ils se précipitèrent sur l’arche pour en briser la porte et y pénétrer. Mais Jéhova, excitant contre eux les bêtes qui l’entouraient, elles les attaquèrent et en tuèrent un grand nombre, et les autres s’enfuirent de tous côtés et se dispersèrent sur toute la face de la terre.

Or, toute chair de la terre périt dans l’eau, depuis l’homme jusqu’aux animaux: les quadrupèdes, les reptiles et les oiseaux de l’air. Il ne survécut que Noé et tout ce qui avec lui était retiré dans l’arche. Les eaux augmentaient prodigieusement en volume et en force, et elles soulevèrent l’arche à une grande hauteur au-dessus de la terre. L’arche, ballottée par l’agitation des flots, qui se battaient entre eux, se renversait et pensait se briser. Et tout ce qu’elle renfermait d’êtres vivants étaient bouleversés pêle-mêle comme le potage bouillant dans la marmite (1170). Tous les êtres de l’arche furent consternés: les lions rugissaient, les bêtes bovines meuglaient, les loups hurlaient, et chaque autre espèce se plaignait en son langage. Leurs voix confondues s’étendaient au loin. Noé aussi et ses enfants criaient et pleuraient dans leur anxiété et effroi, et ils se virent arrivés jusqu’aux portes de la mort. Alors Noé éleva sa voix suppliante vers Jéhova, disant: De grâce, ô Jéhova! secourez-nous, car nous n’avons pas la force de supporter ce mal qui nous enveloppe. Les vagues furieuses des eaux m’assiègent, les torrents de Bélial m’épouvantent, je suis entouré des lacets de la mort. Exaucez-nous, ô Jéhova! exaucez-nous. Délivrez-nous, ô Jéhova! délivrez-nous. Tournez votre face vers nous, prenez pitié de nous et sauvez-nous. Jéhova entendit la voix de Noé, et il se souvint de lui; et il fit aussitôt passer sur la terre un vent doux, et les eaux se calmèrent, et l’arche vogua tranquillement; et en même temps les sources de l’abîme et les cataractes du ciel se fermèrent. En ces jours-là, les eaux allaient toujours en diminuant, et l’arche s’arrêta enfin sur les montagnes d’Ararat. Alors Noé ouvrit la fenêtre de l’arche, et il invoqua de nouveau Jéhova, disant: Je vous prie, ô Jéhova! Dieu de la terre et des mers et de tout ce qu’elles renferment, tirez-nous de la prison, délivrez-moi des entraves dont vous m’avez chargé, car je m’affaiblis beaucoup, et je m’épuise en gémissements. Jéhova entendit la voix de Noé, et lui dit: Tu sortiras de l’arche dès que tu y auras complété une année entière de séjour. Or, cette année étant révolue le vingt-septième jour du deuxième mois, la terre était desséchée, et Noé enleva la couverture de l’arche. Cependant Noé et ses enfants ne voulaient pas sortir de l’arche sans l’ordre de Jéhova. Et le jour arriva où Jéhova leur dit: Sortez de l’arche. Alors Noé et ses enfants allèrent s’établir chacun dans le pays que Jéhova leur assigna, et ils le servaient fidèlement tous les jours de leur vie. Jéhova les avait bénis lors de leur sortie de l’arche, en leur disant: Fructifiez de manière à remplir toute la terre; multipliez-vous en très grande quantité.

Et voici les noms des enfants de Noé: Japheth, Cham et Sem. Et ils eurent des enfants après le déluge. Voici les noms des fils de Japheth: Gomer, Magog, Madaï, Javan, Thubal, Mosoch et Thiras; sept fils. Les fils de Gomer furent: Ascenès, Riphath et Thogorma. Les fils de Magog: Élaï, Halaph et Lobob. Les fils de Madaï Ahvan, Zila, Honi et Lot. Les fils de Javan: Élisa, Tharsis, Céthim et Dodanim. Les fils de Thubal: Ariphaï, Césed et Thoori. Les fils de Mosoch: Dedan, Zaron et Sibsani. Les fils de Thiras: Benib, Géra, Bizon, Lophrion et Gilac. Voilà les enfants de Japheth, selon leurs familles, comprenant en ces jours-là environ quatre cent soixante hommes. Voici les enfants de Cham: Chus, Mesraïm, Phuth et Chanaan; quatre fils. Les fils de Chus: Saba, Hevila, Sabatha, Regma, Sabatacha. Les fils de Regma: Raba et Dedan. Les fils de Mesraïm: Lud, Ana, Laab, Nephtoa, Phétros, Chasluh et Caphtor. Les fils de Phuth: Gebal, Hadan, Bena et Éden. Les fils de Chanaan: Sidon, Heth, Amorrhi, Gergesi, Hevi, Araci, Sini, Arvadi, Samari et Hamath. Voilà les fils de Cham, selon leurs familles. Leur dénombrement était en ces jours-là de sept cent trente hommes. Voici les fils de Sem: Élam, Assur, Arphaxad, Lud et Aram; cinq fils. Les fils d’Élam: Sosan, Mahol et Hermon. Les fils d’Assur: Merus (1171) et Mucil. Les fils d’Arphaxad: Salé, Aner et Escol. Les fils de Lud: Phothor et Rizzaion. Et les fils d’Aram: Us, Hul, Géther et Mes. Voilà les fils de Sem, selon leurs familles. Leur nombre en ces jours-là montait à trois cents hommes. Voici les générations de Sem: Sem engendra Arphaxad, et Arphaxad engendra Salé, et Salé engendra Héber. D’Héber naquirent deux fils; le nom de l’un était Phaleg, parce que pendant sa vie les hommes furent dispersés, et à la fin de ses jours la terre fut divisée. Et il nomma le second Jectan, parce que dans ses jours la vie des hommes fut amoindrie (1172). Voici les fils de Jectan: Elmodad, Saleph, Asarmoth. Jaré, Aduram, Uzol, Décla, Ébal, Abimaël, Saba, Ophir, Hevila et Jobab. Tous ceux-là furent les fils de Jectan. Et Phaleg engendra Reu. Reu engendra Sarug. Sarug engendra Nachor. Nachor engendra Tharé. Et Tharé, étant âgé de trente-huit ans, engendra Aran et Nachor (1173).

En ces jours-là Chus, fils de Cham, fils de Noé, prit dans sa vieillesse une femme qui enfanta un fils, et on le nomma Nemrod, parce que, en ce temps-là, les hommes recommençaient à se révolter contre Dieu et à le braver (1174). L’enfant grandit, et son père l’aimait tendrement, parce qu’il était le fils de sa vieillesse. Et Chus lui fit présent des tuniques de peau que Dieu avait faites pour Adam et sa femme, lorsqu’ils sortirent du paradis. Car après leur mort ces tuniques furent données à Hénoch, fils de Jared. Hénoch, au temps de son enlèvement vers Dieu, les donna à Mathusala son fils. Après la mort de Mathusala, Noé les prit et les garda avec lui dans l’arche. À la sortie de l’arche, Cham les déroba et les cacha si bien que ses frères ne pouvaient les retrouver. Cham les donna clandestinement à Chus son fils aîné, qui en faisait mystère à ses frères et à ses fils. Quand Nemrod eut atteint l’âge de vingt ans, il le revêtit de cet habillement qui lui communiqua une force extraordinaire, et il devint un puissant chasseur sur la terre. Il construisait des autels et y immolait en l’honneur de Jéhova les bêtes qu’il prenait à la chasse. Nemrod s’éleva par sa puissance au-dessus de ses frères, et il les protégeait contre leurs agresseurs des contrées d’alentour; car Jéhova le rendait victorieux dans chacune de ses expéditions guerrières. Et il devint roi dans le pays. Dès lors quand un chef armait ses gens pour aller à la guerre, on lui disait, par manière de proverbe: Puisse Dieu te protéger contre tes ennemis et te rendre fort comme Nemrod, le puissant chasseur sur la terre, toujours victorieux!

En ce temps-là, Nemrod étant âgé de quarante ans, ses frères étaient en guerre avec les enfants de Japheth, et ils succombèrent. Alors Nemrod alla et rassembla toutes les familles des enfants de Chus, près de quatre cent soixante hommes. Il prit aussi à sa solde ses amis et familiers, environ quatre-vingts hommes. Avec cette armée il combattit contre les ennemis de ses frères, et les défit et les soumit à son pouvoir et à celui de ses frères. Il établit des gouverneurs dans leurs villes et emmena de leurs enfants en otage. Et Nemrod revint de cette expédition triomphant et plein de joie. Alors tous ses frères et ses amis s’assemblèrent devant-lui et le proclamèrent leur roi, et ils posèrent sur sa tête la couronne royale. Il préposa sur ses serviteurs et sur son peuple des princes, des juges et des magistrats, et il créa général de son armée Tharé, fils de Nachor, et il l’éleva en dignité au-dessus de tous ses princes.

Or, Nemrod investi de l’autorité absolue de roi, et victorieux de tous ses ennemis, résolut, après avoir demandé l’avis de ses conseillers, de se bâtir une ville très grande en étendue. Et l’on trouva pour son emplacement une plaine spacieuse vers l’Orient. Et Nemrod nomma la ville bâtie Sennaar, parce que Jéhova avait renversé ses ennemis (1175). Il y régnait en sécurité, car nul n’osait l’inquiéter, et sa puissance, s’étendait au loin. Toutes les nations des autres pays, en apprenant sa gloire, venaient en foule se prosterner devant lui la face contre terre, et lui offrir des présents, et le reconnaissaient pour leur souverain seigneur. Et plusieurs venaient demeurer dans sa ville de Sennaar.

Mais Nemrod cessa de marcher dans la voie de Jéhova, et il devint plus impie que tous les hommes qui l’avaient précédé depuis le déluge. Il façonnait des idoles de bois et de pierre et les adorait, et il portait ses serviteurs et les habitants du pays à s’élever contre Jéhova. Mardon, son fils, surpassait même son père en impiété. Et cela faisait dire: Des impies provient l’impiété. Ces paroles sont devenues un proverbe qui dura jusqu’à ce jour (1176).

Tharé, élevé aux plus hautes dignités, était fort aimé et estimé du roi et de ses princes. Il prit une femme qui s’appelait Amthela, et elle conçut et enfanta un fils. Et Tharé nomma son fils Abram; car, dit-il, le roi m’a élevé au-dessus de tous ses princes (1177). Lors de cette naissance, Tharé était âgé de soixante-dix ans. Et il arriva que dans la nuit où naquit Abram, tous les serviteurs de Tharé, tous les sages et tous les magiciens de Nemrod se réunirent chez Tharé pour se réjouir avec lui en mangeant et en buvant. En sortant de sa maison, les sages et les magiciens levèrent les yeux au ciel, et voici qu’ils observèrent une grande étoile qui accourait de l’Orient avec une extrême vitesse et engloutit une étoile à chacun des quatre vents du firmament. Ils furent frappés de ce phénomène, et ils comprirent ce qu’il signifiait. Ils se dirent donc l’un à l’autre: Ceci n’a rapport à rien moins qu’à l’enfant né cette nuit à Tharé. Il deviendra grand et se multipliera infiniment. Lui et sa postérité se rendront maîtres de la terre, après qu’ils auront tué de grands rois. Le lendemain ils se levèrent tous de bon matin et se réunirent en conseil. Et ils se dirent: Le roi ignore le phénomène qui nous a apparu hier au soir. Si dans la suite des temps il en est instruit, il nous demandera: Pourquoi m’avez-vous caché cette chose? et nous serons tous condamnés à mourir. Venez maintenant, annonçons au roi ce que nous avons vu, et nous ne courrons pas de risque. Ils allèrent donc se présenter devant le roi, et se prosternant la face contre terre, ils crièrent: Vive le roi! Vive le roi! Et ils lui rendirent compte du festin de Tharé et du phénomène céleste. Et ils ajoutèrent: Nous avons approfondi ce qu’annonce ce prodige, et nous avons reconnu par notre science le malheur qui menace tous les rois de la terre de la part de l’enfant de Tharé. Maintenant, ô roi notre seigneur, nous t’avons averti. Si le roi le trouve bon, il comptera au père ce que vaut l’enfant, et nous lui ôterons la vie. Leur discours plut aux yeux du roi qui aussitôt manda en sa présence Tharé et lui répéta toutes les paroles des sages et des magiciens. Puis il ajouta: Maintenant, livre-moi cet enfant, afin que nous le fassions mourir avant que se développe le danger qu’il amène avec lui au monde, et je te donnerai pour son prix la maison pleine d’or et d’argent. Tharé répondit: Tout ce que mon seigneur le roi désire sera accompli par son serviteur. Mais que le roi me permette de lui raconter ce qui m’est arrivé hier. Le conseil que le roi me donnera servira de règle à ma réponse concernant la chose qu’il exige de moi. Le roi lui dit: Parle. Et Tharé commença ainsi: Aéion, fils de Morad, vint hier au soir dans ma maison et me dit: Cède-moi le beau et grand cheval dont le roi t’a fait présent. Je t’en pèserai en retour de l’argent et de l’or, et je remplirai ta maison de paille et de fourrage. Je lui répondis: Attends jusqu’à ce que j’aie vu le roi, et je ferai comme il me dira. En entendant ces paroles de Tharé, le roi se fâcha et lui dit: As-tu perdu la raison pour penser à conclure un pareil marché? Insensé, n’as-tu pas assez d’or et d’argent, et à plus forte raison de fourrage, pour que tu aies besoin de te défaire du beau cheval dont je t’ai fait présent et qui n’a pas son second sur la terre? Et Tharé dit au roi: Tel est pourtant ce que me propose le roi mon seigneur. À quoi me servira tout l’or et tout l’argent si je perds le fils qui doit en hériter? (1178) Après ma mort mes biens retourneraient au roi qui me les a donnés. Mais les paroles de Tharé et son excuse excitèrent encore davantage la colère du roi. Tharé voyant l’irritation du roi, dit: Que l’indignation du roi mon seigneur ne s’allume pas davantage contre son serviteur. Qu’il dispose de tout ce que j’ai, qu’il me traite selon son bon plaisir: je lui offre mon fils gratuitement. Mais le roi dit: Non, je veux l’acheter et payer son prix. Tharé dit alors: Je demande en grâce qu’il me soit permis d’ajouter un mot. Accorde-moi un répit de trois jours, afin que je puisse informer de cette chose ma femme et ceux de ma maison, et les y préparer. Et le roi acquiesça à cette prière de Tharé. Le troisième jour s’étant levé, le roi fit dire à Tharé: Livre-moi ton fils, ainsi que je te l’ai ordonné, de peur que je n’envoie de mes gens massacrer tout ce qui se trouve dans ta maison, et l’on n’y épargnera pas même l’animal qui urine contre le mur. Et Tharé fit diligence, car l’ordre du roi était pressant, et il prit l’enfant qu’une de ses esclaves avait mis au monde le jour de la naissance d’Abram, et il l’apporta au roi, et en reçut le prix. Le roi saisit l’enfant et le lança avec force contre terre, et la tête de l’enfant se fracassa et il expira aussitôt. Le roi, ses princes, et ses serviteurs, comme aussi tous les magiciens et tous les sages, se croyaient certains que c’était Abram qui venait de périr. Et le roi perdit la pensée de cette chose et l’oublia entièrement. C’est ainsi que Jéhova protégea Tharé, afin qu’Abram son fils fût conservé en vie. Tharé prit secrètement son fils Abram, sa mère et sa nourrice et alla les cacher dans une caverne; et il leur apportait de la nourriture chaque mois. Et Jéhova était avec Abram qui croissait. Or, Abram resta dans la caverne l’espace de dix ans.

Et Aran, fils de Tharé, frère aîné d’Abram, prit en ces jours-là, à l’âge de trente-neuf ans, une femme, et elle conçut et enfanta un fils qu’il nomma Lot. Elle conçut de nouveau et enfanta une fille, et elle la nomma Melcha; Elle conçut encore et enfanta une fille, et elle la nomma Saraï. Aran avait quarante-deux ans lors de la naissance de Saraï, et Abram dix ans (1179).

En ces jours-là Abram sortit de le caverne avec sa mère et sa nourrice; car le roi et ses serviteurs n’avaient plus aucun souvenir de ce qui s’était passé à son égard. Et il alla demeurer dans la maison de Noé et de Sem son fils, afin d’y apprendre la doctrine de Jéhova et ses voies. Et nul ne connaissait Abram, qui recevait l’instruction de Noé et de Sem durant de longs jours, trente-neuf ans. Abram connaissait Jéhova depuis l’âge de trois ans, et il lui est resté attaché jusqu’au jour de sa mort, selon tout ce que Noé et Sem lui avaient enseigné. Mais tous les autres habitants de la terre étaient rebelles à Jéhova, leur Créateur, et le mettaient en oubli. Ils servaient des dieux étrangers. Ils se façonnaient chacun son idole pour l’adorer: idoles de bois et de pierre, qui n’entendent pas, ne parlent pas, et ne peuvent pas sauver. Il n’était pas alors sur toute la terre un seul homme qui connût Jéhova, excepté Noé et sa maison et ceux qui étaient sous sa direction (1180). Le roi et tous ses serviteurs, comme aussi Tharé avec toute sa maison, étaient les principaux adorateurs du bois et de la pierre. Tharé avait douze grandes idoles, selon le nombre des mois de l’année. Il servait chacune d’elles pendant son mois, en lui offrant des oblations et des libations. Mais Abram qui grandissait secrètement dans la maison de Noé, avait reçu de Jéhova un cœur intelligent et prudent, et il comprenait que la génération de ses jours était adonnée à des vanités, car les idoles qu’elle adorait étaient de fausses divinités qui ne pouvaient donner aucun secours. Lorsqu’il observa pour la première fois le soleil comme il éclairait toute la terre, il pensa en lui-même: Ce soleil est sûrement Dieu et je l’adorerai. Et durant cette journée entière il l’honorait et l’invoquait. Le soir venu, le soleil disparut comme de coutume. Alors Abram de nouveau pensa en lui-même: Sûrement, celui-ci n’est pas Dieu. Et il se demanda: Qui donc est celui qui a fait le ciel et la terre, et créé l’homme? Où se tient-il? Pendant qu’il parlait ainsi en son cœur, la nuit s’obscurcissait sur lui. Et, levant les yeux vers les quatre vents, il reconnut que le soleil avait abandonné le temps aux ténèbres. Et apercevant la lune accompagnée des étoiles, il dit: Pour cette fois, voici le Dieu qui a créé la terre et tous les hommes. Et voici ses serviteurs qui se tiennent devant lui prêts à recevoir ses ordres. Et pendant cette nuit entière il honorait la lune et l’invoquait. Au retour du matin, qui ramena comme à l’ordinaire le soleil, et effaça du ciel la lune, Abram reconnut qu’aucun des astres n’est Dieu, mais qu’ils sont les serviteurs de Jéhova, le Dieu qui a créé toutes choses. Et Abram continuait à demeurer dans la maison de Noé, et il y apprenait à connaître Jéhova et ses voies. Et il lui restait fidèle tous les jours de sa vie.

Et le roi Nemrod était souverain maître de toute la terre, et toute la terre avait une seule langue, et les mêmes manières de parler. Et tous les princes de Nemrod, et tous ses grands se concertèrent ensemble, Phuth et Mesraïm et Chus et Chanaan, suivant leurs familles, et ils dirent l’un à son prochain: Allons, bâtissons-nous une ville, et élevons au milieu d’elle une tour solide et fortifiée dont le sommet atteigne jusqu’au ciel. Nous rendrons notre nom célèbre; car nous maîtriserons le monde entier en subjuguant par la force nos ennemis avant qu’ils viennent nous attaquer pour nous disperser sur toute la face de la terre. Ils allèrent se présenter devant le roi, et lui répétèrent toutes ces paroles; et le roi approuva la chose qu’ils proposaient. Et toutes les familles se réunirent, environ six cent mille individus, et se mirent à la recherche d’un lieu assez étendu pour y asseoir la ville et la tour. Et après avoir parcouru toute la terre, ils n’en trouvèrent aucun qui fût préférable à la plaine située à l’Orient du pays de Sennaar. Elle avait une étendue de deux années de marche. Tous alors s’y transportèrent et s’y logèrent. Ils se mirent à faire, pour leurs constructions, de la brique qu’ils mettaient cuire au feu.

Or, l’entreprise de construire la tour fut pour eux l’occasion de se révolter contre Jéhova, Dieu du ciel, et de l’irriter. Ils songeaient à le combattre de près et à s’emparer du ciel. Et ils se partageaient, selon leurs familles, en trois classes. La première disait: Nous monterons au ciel et nous le combattrons. La deuxième disait: Montons au ciel, et plaçons-y nos dieux pour les honorer. La troisième disait: Montons au ciel, et frappons-le de nos arcs et de nos flèches. Mais Dieu connaissant ce qui était au fond de leurs pensées, regardait la ville et la tour (1181) en construction. La tour était déjà arrivée à une hauteur telle que ceux qui portaient le ciment et les briques aux maçons, mettaient une année entière pour arriver jusqu’à eux. Et le nombre des porteurs qui sans cesse montaient et descendaient était infini. Et lorsqu’une brique s’échappait de la main de l’un d’eux, et se brisait, tous en pleuraient; mais quand un homme tombait et se tuait, nul n’y faisait attention. Or, du haut de la tour qu’ils continuaient à élever, ils lançaient contre le ciel des flèches, et elles retombaient teintes de sang. Alors ils disaient l’un à son prochain: Ah! voilà que nous tuons tout ce qui est dans le ciel!

Mais Jéhova voulait par là les entretenir dans leur égarement, afin de les faire disparaître de la terre.

Ils continuaient ainsi à bâtir pendant une longue suite de jours et d’années. À la fin Dieu dit aux septante anges (1182) que leur dignité approche de la splendeur de sa gloire: Allons, descendons et confondons leur langue de telle sorte qu’ils ne se comprennent plus entre eux. Et ainsi il fit. Depuis ce jour, l’un n’entendait plus l’idiome de l’autre; et lorsqu’un maçon recevait de la main de son compagnon (1183) des matériaux qu’il n’avait pas demandés, il les lui lançait à la tête et le tuait: et un grand nombre d’eux moururent de cette manière. Et Jéhova punit les trois classes selon leurs œuvres et leurs pensées. Ceux qui avaient dit: Montons au ciel et plaçons-y nos dieux, furent transformés en singes et en babouins (1184). Ceux qui avaient dit: Frappons le ciel de nos flèches, s’entre-tuèrent eux-mêmes. Ceux qui avaient dit: Faisons-lui la guerre, Jéhova les dispersa par toute la terre. Les autres, comprenant le mal qu’ils s’étaient attiré, abandonnèrent leur entreprise et se dispersèrent d’eux-mêmes. Quant à la tour, la terre ouvrant sa bouche, en engloutit un tiers: un feu descendu du ciel en consuma un autre tiers, et le troisième tiers en subsiste jusqu’à ce jour (1185). C’est ainsi que fut arrêtée la construction de la ville et de sa tour. Ce lieu fut nommé Babel, parce que Jéhova y confondit la langue de toute la terre; et voici qu’il est à l’orient de Sennaar.

En ces jours-là mourut Phaleg, fils d’Héber, âgé de deux cent trente neuf ans, en la quarante-huitième année de la vie d’Abram fils de Tharé.

Lorsque Jéhova eut dispersé les hommes sur toute la face de la terre, à cause du péché de la tour, ils se rassemblèrent suivant leurs familles et leurs langues, et émigrèrent vers les quatre plages du monde. Là, ils s’arrêtaient et bâtissaient des villes qu’ils appelaient de leurs propres noms, ou de ceux de leurs enfants, ou des événements qui leur advenaient. Et voici les enfants de Japheth par familles: Gomer, Magog, Madaï, Javan, Thubal, Mosoch et Thiras (1186). Les enfants de Gomer, selon leurs villes, sont: les Francs qui demeurent dans le pays de France, sur le fleuve de France, le fleuve de la Seine. Les enfants de Riphath sont les Bretons qui demeurent dans le pays de Bretagne sur le fleuve de Lira (1187), qui verse son eau dans la grande mer de Géhon, qui est l’Océan. Les enfants de Thogorma formèrent dix familles; et voici leurs noms: Cozar (1188), Patzinach (1189), les Bulgares; Anchialus (1190), Ragabib (1191), les Turcs (1192); Buz (1193), Zabuch (1194) les Hongrois et Tilmatz (1195). Tout ceux-là sont allés demeurer au Nord, et bâtirent des villes qu’ils nommèrent de leurs propres noms. Ils sont établis jusqu’à ce jour sur les fleuves Héthla et Italach (1196). Mais les Hongrois, les Bulgares et les Patzinachs sont établis sur le grand fleuve du Danube. Les enfants de Javan sont les Grecs qui demeurent dans le pays de Macédoine. Madaï, ce sont les Hérules qui demeurent dans le pays de Chorasan. Les enfants de Thubal sont ceux qui demeurent dans le pays de Toscane sur le fleuve de Pise (1197). Les enfants de Mosoch sont les Sibsani (1198). Thiras, ce sont les Russes, les Posnaniens (1199) et les Anglais. Tous ceux-ci allèrent et se bâtirent des villes qui sont situées sur la mer de Jébus et sur la rivière de Cura (1200) qui se décharge dans le fleuve de Taragan. Les enfants d’Élisa sont les Allemands. Ceux-ci se bâtirent aussi des villes qui sont situées entre les montagnes du Jura et la Septimanie (1201). Ils ont conquis le pays d’Italie, et ils y demeurent jusqu’à ce jour. Les Céthim sont les Romains qui demeurent dans la plaine de Campanie, sur la mer du Tibre (1202). Les Dodanim, sont ceux qui demeurent dans les villes de la mer de Géhon (1203), dans le pays de Bardena (1204). Telles sont les familles des enfants de Japheth selon leurs villes et leurs langues, après leur dispersion d’auprès de la tour.

Les enfants de Cham furent: Chus, Mesraïm, Phuth et Chanaan, selon leurs descendances et leurs villes. Tous ceux-ci allèrent et bâtirent aux lieux dont ils firent choix, des villes auxquelles ils donnèrent les noms de leurs pères: soit Chus, soit Mesraïm, soit Phuth, soit Chanaan. Les enfants de Mesraïm furent: les Ludim, les Anamim, les Lahabim, les Nephthuim, les Phétrusim, les Chasluïm et les Caphthorim; sept familles. Tous ceux-ci sont établis sur le fleuve Sihor qui est le fleuve de l’Égypte. Les Phétrusim et les Chasluïm s’allièrent entre eux par des mariages et ils donnèrent naissance aux Philistins, aux Gazéens, aux Geraréens, aux Géthéens et aux Accaroniens (1205): cinq familles. Ceux-ci se bâtirent des villes et leur imposèrent les noms de leurs pères, qu’elles portent jusqu’à ce jour. Les enfants de Chanaan aussi se bâtirent des villes et les nommèrent de leurs propres noms: onze villes avec leurs innombrables villages. Or, quatre hommes de la race de Cham se portèrent dans la région de la plaine. Et voici les noms de ces hommes: Sodome, Gomorrhe, Adama, Seboïm. Ils bâtirent quatre villes et les nommèrent de leurs noms, et ils y habitaient en sécurité et s’y multipliaient prodigieusement. Séir, fils de Hur, fils de Hévéus, fils de Chanaan, trouva une vallée vers la montagne de Pharan, et il s’y établit avec ses sept fils et tous les siens. Il donna son nom à la ville qu’il y bâtit. C’est le pays appelé Séir jusqu’au jour présent. Voilà les familles des enfants de Cham selon leurs langues et leurs villes après leur dispersion d’auprès de la tour.

Les enfants de Sem, fils de Noé, père de tous les enfants d’Héber, s’en allèrent aussi et se bâtirent des villes dans les lieux où ils immigrèrent, et les nommèrent de leurs noms. Les enfants de Sem furent: Élam, Assur, Arphaxad, Lud et Aram. Assur voyageant au loin avec ses enfants, population très nombreuse, rencontra une vallée fort spacieuse: ils y bâtirent quatre villes qu’ils nommèrent soit de leurs noms, soit des choses survenues. Et voici les noms de ces villes: Ninive, Résen, Chalé et Rohoboth. Et les Assyriens y demeurent jusqu’à ce jour. Les enfants d’Aram aussi allèrent et se bâtirent une ville à laquelle ils donnèrent le nom de leur frère aîné Us, et en firent leur demeure. C’est le pays d’Us, ainsi appelé jusqu’à ce jour.

La deuxième année après l’événement de la tour, une homme sortit de Ninive, de la maison d’Assur. Et son nom était Béla. Il allait cherchant où il pourrait demeurer avec les siens. Et ils arrivèrent aux environs des villes de la plaine, en face de Sodome, et ils s’y arrêtèrent. L’homme se mit à bâtir une petite ville qu’il nomma de son nom, Béla; et le territoire en est appelé Ségor (petit) jusqu’à ce jour. Voilà les familles des enfants de Sem selon leurs langues et leurs villes nombreuses. Et ils se donnèrent des rois dans tous leurs établissements, pour être gouvernés sous leur autorité à tout jamais.

Et Nemrod résidait encore dans le pays de Sennaar dont il était roi, et il avait bâti quatre villes. Il appela l’une Babel, en souvenir de la confusion des langues; la seconde, Arach, à cause de la dispersion des hommes; la troisième, Achad, parce qu’il s’y était livré une grande bataille; enfin la quatrième, Chalanné, parce que là ses chefs et ses guerriers l’avaient abandonné et s’étaient déclarés contre lui (1206). Il établit dans ses villes le peuple qui lui était demeuré fidèle, et il renouvela avec le reste de ses sujets le pacte de sa royauté. Ses chefs et ses serviteurs lui donnèrent le nom d’Amraphel, à cause de la perte d’une partie de ses gens lors de la construction de la tour, et de ce qui lui était arrivé à lui-même (1207). Cependant Nemrod ne revenait pas à Jéhova, et il continuait à donner aux hommes l’exemple de l’impiété. Et même son fils Mardon surpassait dans son impiété toutes les abominations de son père, et il induisait les hommes à pécher. Vers ce temps-là les familles de la race de Cham étaient en guerre entre elles. Et Chodorlahomor, roi d’Élam, marcha contre les cinq villes de la plaine, et les vainquit et les réduisit sous sa puissance. Elles lui restèrent soumises pendant douze ans, lui payant tribut.

En ces jours-là mourut Nachor fils de Sarug, dans la quarante-neuvième année d’Abram fils de Tharé.

Or, dans la cinquantième année de sa vie, Abram quitta la maison de Noé, et revint dans celle de son père qui était toujours général de l’armée du roi Nemrod, et continuait à suivre le culte des dieux étrangers, qui ne sont que bois et pierre. Et Abram voyant chez son père douze idoles érigées dans un temple qui leur était consacré, fut enflammé de colère, et il dit: Vive Dieu! ces simulacres ne resteront pas dans la maison de mon père. Que le Dieu qui m’a créé me punisse plusieurs fois si dans trois jours je ne les aurai pas tous brisés. Et en sortant de ce lieu il trouva son père assis dans la cour extérieure. Alors il s’arrêta devant lui, et lui adressa cette demande: Apprends-moi, ô mon père, où est le Dieu qui a créé le ciel et la terre et tous les hommes: celui qui t’a créé, qui m’a créé. Son père lui répondit: Celui qui a créé tout cela est chez nous, dans cette maison. Et son père le mena dans le sanctuaire où étaient rangées en ordre douze idoles grandes, accompagnées d’autres plus petites sans nombre; et il dit à Abram son fils: Voici les dieux qui ont fait et conservent tout ce que tes yeux voient sur la terre. Et Tharé, après s’être prosterné devant chacun de ses dieux, sortit du temple avec son fils. Alors Abram alla trouver sa mère et lui dit: Mon père m’a fait voir ses dieux; maintenant hâte-toi et me prends un chevreau du troupeau, et accommode-le en mets appétissant, pour que je le leur offre. Et sa mère fit ainsi. Et Abram alla présenter le plat de chevreau aux dieux de son père, qui en ignorait. Abram passa la journée entière à les observer, et pas un son de voix, pas le moindre mouvement de leur part: nul n’étendit la main vers le plat. Alors Abram se railla d’eux disant: Ce mets n’est peut-être pas de votre goût, ou pas assez copieux. Attendez, je vous régalerai mieux demain: nous verrons ce qui en sera à la fin. Le lendemain il demanda à sa mère trois beaux chevreaux en ragoût plus relevé, et il les posa devant les mêmes dieux, toujours à l’insu de son père. Et il s’assit pour voir s’ils mangeraient. Pendant qu’il remarquait en ce lieu le même silence et la même immobilité que le jour précédent, voici que l’esprit de Jéhova s’empara de lui, et dans son indignation contre son père, il parcourut la maison en s’écriant: Malheur et malédiction sur mon père et sur toute cette mauvaise génération, qui donnent leur cœur à ces vanités, et rendent un culte impie à de pareilles idoles de bois et de pierre, qui ont une bouche et ne parlent point, des yeux et ne voient point, des oreilles et n’entendent point, des mains et ne touchent point, des pieds et ne marchent point. Qu’ils soient comme elles, tous ceux qui les font, et tous ceux qui s’y confient. Et il se saisit promptement d’une hache, et courut dans la salle des dieux de son père, et les mit en pièces tous ensemble. Mais il épargna le plus grand et lui mit la hache entre les mains, et sortit ensuite.

Cependant Tharé en entendant le bruit qui retentissait dans son sanctuaire se hâta d’y accourir, et voici que les morceaux de ses dieux brisés jonchaient le sol, et il entra dans une grande colère. Il se précipita hors du temple à la recherche d’Abram, et il le trouva assis dans la maison. Et il lui dit: Pourquoi as-tu commis ce crime envers mes dieux? Abram répondit: Non, mon seigneur, je n’ai rien fait de coupable. Lorsque je leur offris le plat de chevreau, tous y mirent la main pour en manger avant que le plus grand s’approchât. Alors celui-ci mécontent de leur précipitation, alla s’armer de la hache, et dans sa colère les mit en pièces l’un après l’autre. Et voici que le fer est encore dans sa main. Mais Tharé s’emporta davantage contre Abram et lui dit: Quel est ce mensonge que tu me contes? C’est toi qui as mis la hache à la main du plus grand. Comment ces dieux pouvaient-ils faire ce que tu dis? N’est-il pas vrai qu’ils ne sont que du bois et de la pierre, et que c’est moi qui les ai façonnés? Alors Abram répondit à son père: S’il en est ainsi, pourquoi adores-tu des idoles de cette incapacité? Pourront-elles te protéger quand tu les invoqueras, ou te sauver des ennemis qui viendront t’attaquer? Toi et tous ceux qui t’imitent, vous avez tort et vous agissez en hommes insensés d’adorer du bois et de la pierre, matières brutes et sans raison, et de mettre en oubli Jéhova, le Dieu qui a créé le ciel et la terre. Vous attirerez sur vous de grands maux. N’est-ce pas ainsi que nos ancêtres, dans les jours du temps passé, ont irrité par leurs iniquités Jéhova, Dieu de l’univers, qui a fait périr toute la terre dans les eaux du déluge? Maintenant, ô mon seigneur et père, renonce à cette impiété et attache-toi à Jéhova. Sur cela, Abram courut en présence de son père retirer la hache de la main du grand dieu, et le brisa, puis il s’enfuit. Tharé désolé de l’action d’Abram son fils, alla sans retard se présenter devant le roi et se prosterna la face contre terre. Nemrod lui dit: Que t’est-il arrivé? Tharé répondit: Mon seigneur, un enfant m’est né, il y a cinquante ans, et il a fait en ce jour à moi et à mes dieux ceci et cela. Maintenant, ô roi, mon seigneur, envoie des hommes et fais-le amener devant toi, et juge-le selon la justice, afin que nous évitions le courroux de nos dieux. Et le roi envoya trois gardes qui amenèrent Abram en sa présence. Ce jour-là Nemrod était assis sur son trône, et tous les princes et officiers étaient assis devant lui, et Tharé était assis en avant d’eux. Et Nemrod interrogea Abram sur ce qu’il avait fait à son père et à tous ses dieux. Abram répéta les paroles qu’il avait dites à son père; savoir, que c’était le grand dieu qui avait brisé les autres dieux. Le roi lui dit: Ces dieux ont-ils la faculté de parler, de manger, de faire tout ce que tu viens de dire? Alors Abram lui répondit: Puisqu’ils ne sont capables d’aucune action, pourquoi les sers-tu? Pourquoi égares-tu les hommes après ces vanités? Peux-tu penser qu’ils sont en état de te protéger, ou de faire en ta faveur quoi que ce soit, grand ou même petit? Pourquoi ne servez-vous pas, vous autres, le Dieu de toute la terre, qui a le pouvoir de vous conserver en vie et de vous faire mourir, selon qu’il lui plaît? Malheur à toi, ô roi insensé, niais, idiot! malheur à toi jusque dans l’éternité! J’espérais que tu enseignerais à tes sujets la voie droite, et en vérité tu n’as pas agi selon ce qui est bien. Toute la terre est pleine de tes péchés et des péchés de ton peuple qui t’imite dans le mal. N’as-tu pas entendu dire qu’en punition des mêmes péchés dont se rendaient coupables nos pères dans les jours de l’antiquité, le Dieu de l’univers envoya les eaux du déluge qui firent périr tout être vivant, et bouleversèrent même la surface de la terre? Maintenant, renonce à tes mauvaises œuvres et sers le maître de l’univers qui tient ton âme en sa main, et tu seras heureux. Mais si ton cœur est assez pervers pour ne pas prêter l’oreille à mes exhortations, tu seras à la fin de tes jours humilié jusqu’à la terre, et tu mourras couvert de honte. Et Abram ayant prononcé ces paroles leva les yeux au ciel et dit: Que Jéhova regarde tous les impies et qu’il les juge. À ces paroles d’Abram le roi le fit saisir et enfermer dans une prison.

Et le dixième jour après cela le roi assembla devant lui tous ses officiers, les gouverneurs de toutes les provinces et les sages, et il leur demanda de porter une sentence contre le fils de Tharé qui avait offensé les dieux et maudit le roi. Tous répondirent: Quiconque maudit le roi doit être suspendu au bois; mais puisque celui-ci a fait toutes les choses qu’il avoue lui-même, et a traité nos dieux avec mépris, la loi ordonne qu’il soit consumé par le feu. Si le roi approuve cette sentence, qu’il envoie de ses serviteurs, et qu’ils chauffent pendant une nuit et un jour le four à briques du roi, et qu’ensuite on y jette cet homme. Et le roi ordonna d’entretenir un grand feu dans le four pendant trois jours et trois nuits, après lesquels il fit tirer Abram de la prison pour le faire brûler. Et tous les serviteurs du roi, ses princes, ses guerriers, tous les juges, comme aussi tous les habitants du pays, au nombre d’environ 900,000 hommes, se tenaient en face du four, pour y voir précipiter Abram. Toutes les femmes et tous les enfants remplissaient les toits des maisons et des tours; et il ne restait pas une âme à la maison, car tous voulaient être, au moins à distance, témoins de ce spectacle.

Or, lorsqu’on amenait Abram, les sages en considérant sa face s’écrièrent: Ô roi, notre maître, nous reconnaissons dans les traits de cet homme l’enfant que nous avons dénoncé au roi, il y a déjà cinquante ans, parce que la nuit de sa naissance une étoile prédisait sa future domination. Et maintenant, son père est également coupable: il a désobéi à ton ordre et s’est joué de toi en te présentant un autre enfant, que tu as fait mourir. Le roi fut enflammé de colère, et il ordonna de lui amener Tharé, et il lui dit: As-tu entendu ce qu’ont dit les magiciens? Avoue-moi la vérité, et tu échapperas à ta peine. Tharé, voyant le roi irrité, lui dit: Tu as entendu la vérité de la bouche des sages, ô roi, mon seigneur; ce qu’ils ont dit est réellement arrivé. Le roi lui dit: Et comment as-tu osé désobéir à mon ordre en me livrant un enfant qui n’était pas le tien? Et tu en as encore reçu le prix! Tharé répondit: Mes entrailles s’étaient émues sur le sort du fils qui est ma chair et mon sang. Le roi lui dit: Qui t’a donné le conseil de me tromper? Si tu ne me caches rien tu ne mourras pas: Et Tharé, dans l’effroi que lui inspirait le roi, dit: C’est Aran, mon fils aîné, qui m’a conseillé cette chose. Or, Aran était âgé de trente-deux ans lors de la naissance d’Abram (1208). À la vérité Aran n’avait donné aucun conseil à son père; mais Tharé parlait ainsi pour se soustraire à la peine qui le menaçait. Le roi lui dit: Aran ton fils, qui t’a conseillé cette chose, mérite la mort. Il périra dans le feu avec Abram. Or, en ce temps-là Aran inclinait vers la croyance d’Abram, mais il cachait sa pensée au fond de son cœur. Il était indécis et se disait en lui-même: Si dans cette épreuve mon frère l’emporte sur le roi, je me déclarerai hautement pour lui; et si le roi est le plus fort, les dieux du roi seront les miens.

Et Aran, par ordre du roi, fut lié avec Abram, et on les amena tous deux pour les livrer au feu. Et les serviteurs du roi les saisirent et les dépouillèrent entièrement, ne leur laissant sur le corps que leurs chausses; puis ils leur attachèrent ensemble les mains et les pieds avec des cordes de chanvre, et les portèrent et les précipitèrent au four. Mais Jéhova prit parti pour Abram. Il eut pitié de lui et le préserva de la voracité du feu, qui ne brûla que ses liens. Quant à Aran, il fut subitement dévoré par l’ardeur des flammes, parce que son cœur n’était pas entier avec Jéhova. Aran était âgé de quatre-vingt-deux ans lorsqu’il périt ainsi à Ur des Chaldéens. Et les hommes qui les avaient précipités au four périrent également au nombre de douze; car une flamme s’en élança vers eux, et les brûla tous. Mais Abram se promenait librement au milieu du feu pendant trois jours et trois nuits; et les serviteurs du roi le voyaient, et ils allèrent en instruire le roi. Lorsque le roi entendit ce qu’ils lui rapportaient, son cœur fut agité violemment, et il ne voulut pas les croire. Il envoya donc d’autres serviteurs dignes de sa confiance, pour s’assurer de ce prodige, et ils revinrent lui dire ce qu’ils avaient vu. Alors le roi se leva et s’y porta lui-même, et il vit Abram qui allait et venait au milieu du feu, couvert de ses chausses. Il aperçut aussi le corps d’Aran réduit en charbon et en cendre. Alors le roi ordonna de retirer Abram du feu; mais lorsque ses serviteurs s’approchèrent du four, une flamme ardente s’en échappa contre eux, et ils furent contraints de fuir. Mais le roi renouvela impérieusement son ordre, disant: Hâtez-vous de retirer Abram, de peur que je ne vous fasse mourir. Ils avancèrent de nouveau; aussitôt le feu tira contre eux une langue plus rude que celle du lion, et leur dévora le visage. Et huit d’entre eux moururent de cette façon. Le roi, voyant enfin que ses serviteurs ne pouvaient approcher du feu sans être brûlés, éleva la voix et cria: Abram, serviteur du Dieu qui est au ciel, viens ici devant moi! Abram obéit, et, couvert de ses chausses, alla se tenir devant le roi. Dans ce moment, le roi, ses officiers et les habitants du pays, en voyant Abram qui avait été préservé du feu, se prosternèrent tous devant lui. Et Abram leur dit: Ne vous prosternez pas devant moi, mais devant le Dieu de l’univers, qui vous a créés, et servez-le, et marchez dans ses voies. C’est lui qui m’a sauvé du feu. Il étend la protection de sa main puissante sur tous ceux qui ont confiance en lui. Et le roi fit à Abram de riches présents, et lui donna les deux principaux serviteurs de sa maison, le nom de l’un était Oni, et le nom de l’autre, Éliéser. De même, les grands officiers du roi et ses autres serviteurs firent à Abram des présents considérables en argent, en or et en pierres précieuses. Abram se retira en paix à la maison de son père. Et beaucoup de serviteurs du roi le suivirent et s’attachèrent à lui, environ trois cents hommes (1209).

En ce temps-là, Nachor et Abram épousèrent deux filles d’Aran leur frère. Le nom de la femme de Nachor était Melcha, et le nom de la femme d’Abram, Saraï. Et Saraï était stérile.

Et deux ans après qu’Abram fut sorti du feu, il arriva que Nemrod, confirmé sur le trône royal à Babylone, s’endormit, et il rêva qu’il se tenait avec toute son armée dans la vallée qui est en face du four à briques du roi. Il leva les yeux, et voici qu’un homme de la ressemblance d’Abram sortit du four, tenant à la main une épée nue, et se précipita sur le roi pour le frapper. Le roi se mit à fuir: mais, pendant sa fuite, l’homme lui lança sur la tête un œuf qui se changea à l’instant en un grand fleuve, dans lequel fut noyée toute son armée. Le roi échappa seul avec trois hommes qui étaient devant lui. Il considéra ces hommes, et voici qu’ils étaient couverts d’ornements royaux, et ils avaient la mine et le port de rois. Quand tous quatre se furent éloignés de là par la fuite, le fleuve redevint un œuf dont sortit un petit poussin qui se mit à voltiger autour de la tête du roi, et lui creva un œil. Cette chose effraya le roi tellement qu’il se réveilla avec de violents battements de cœur. Dès le matin, le roi se hâta de se lever de sa couche, et il manda devant lui les sages et tous les magiciens, et il leur raconta le songe. Alors un sage des serviteurs du roi, nommé Anuki (1210), s’adressant au roi, lui dit: Ceci n’est rien autre chose que le danger qui menace le roi mon seigneur dans le temps à venir de la part d’Abram et de ses enfants. Et voici qu’il arrivera des jours où Abram, ses enfants et les gens de sa maison, attaqueront en armes le roi mon seigneur, et ils battront tous les corps de son armée. Quant à ce que, dans ton songe, tu es échappé du danger, par la fuite, avec trois hommes tes pareils, cela signifie que toi seul avec trois autres rois du pays, tes alliés, vous parviendrez à vous soustraire au sort de vos guerriers. Pour ce que tu as vu que le fleuve est redevenu un œuf dont est sorti un poussin qui t’a crevé un œil, cela ne veut dire autre chose, sinon qu’il arrivera un temps où la race d’Abram tuera le roi. Le songe du roi mon seigneur est une vérité, et l’interprétation de ton serviteur est exacte. Et puis, ne sais-tu pas que tes sages ont vu celte chose dans le ciel, il y a cinquante-deux ans, lors de la naissance d’Abram? Pourquoi le roi mon seigneur permet-il pour son malheur qu’Abram existe dans ce pays la vie sauve? Il faut qu’il meure afin que ta personne soit en sûreté, et ton trône inébranlable. Et Nemrod adopta l’avis d’Anuki, et il chargea secrètement quelques-uns de ses gens de s’emparer d’Abram et de le lui amener pour le mettre à mort.

Or, Éliéser, l’esclave que le roi avait donné à Abram, fut témoin de tout ceci, et il courut et en donna avis à son maître avant l’arrivée des gens du roi. Et Abram, écoutant le conseil d’Éliéser, s’enfuit promptement à la maison de Noé et de Sem son fils, et il s’y tint caché. C’est ainsi qu’il échappa aux gens du roi qui arrivèrent et le cherchèrent vainement dans sa maison et dans tout le pays, en parcourant toutes les routes. Ne l’ayant pas trouvé, ils s’en revinrent auprès du roi, dont la colère se calma; et bientôt après il oublia entièrement Abram.

Et Abram était caché dans la maison de Noé depuis un mois entier, lorsque Tharé, toujours grand auprès du roi, y vint le visiter secrètement. Alors Abram dit à son père: Ne sais-tu pas que le roi, excité par ses impies conseillers, songe à m’ôter la vie, et à exterminer mon nom de dessus la terre? Lève-toi, allons-nous-en tous ensemble au pays de Chanaan, pour nous soustraire à sa tyrannie, de crainte qu’à la fin tu ne périsses également. Car ce n’est pas par affection pour toi que Nemrod te comble d’honneurs, mais pour son propre avantage, et dût-il multiplier tes biens d’autant et encore d’autant, ce ne sont que des vanités de ce monde, et les richesses ne serviront de rien au jour de la vengeance (1211). Fais donc ce que je te dis: éloignons-nous de la malice de Nemrod. Renonce à toutes ces nullités que tu poursuis et sers Jéhova ton Créateur, et il t’en arrivera bonheur. Noé et Sem prenait ensuite la parole, dirent: Abram parle selon la bonne raison en tout ce qu’il te conseille. Et Tharé se rendit au désir de son fils; car Jéhova disposa favorablement son esprit, afin qu’Abram ne tombât point sous le glaive du roi. Tharé prit donc Abram son fils, Lot, fils d’Aran, son petit-fils, Saraï sa bru, comme aussi toutes les personnes de sa maison, et sortit avec eux d’Ur des Chaldéens, de la Babylonie, pour aller au pays de Chanaan. Et étant venus jusqu’à Haran, ils s’y arrêtèrent, parce que le pays était bon et assez spacieux pour y établir tous ceux de leur suite. Les habitants du pays de Haran voyant qu’Abram était bon et agréable aux hommes et à Jéhova son Dieu qui l’assistait, plusieurs d’entre eux s’attachèrent à lui, et entrèrent dans sa maison. Et Abram leur enseigna la doctrine de Jéhova et ses voies saintes.

Or, après la troisième année de la demeure d’Abram à Haran, Jéhova lui apparut et lui dit: Je suis Jéhova qui t’ai tiré d’Ur des Chaldéens, et qui t’ai sauvé de la main de tous tes ennemis. Si tu m’es fidèle, et que tu gardes mes préceptes et mes ordonnances, je ferai tomber tes ennemis devant toi, je multiplierai ta postérité comme les étoiles du ciel, j’enverrai ma bénédiction sur toutes les œuvres de tes mains et tu auras abondance de toutes choses. Maintenant, lève-toi, prends ta femme et tout ce que tu possèdes, et va-t’en au pays de Chanaan pour y établir ta demeure. C’est là que je serai ton Dieu et que je te bénirai. Et Abram se leva et fit tout comme Jéhova lui avait commandé. Et Abram était âgé de cinquante-cinq ans lorsqu’il sortit Haran (1212). Arrivé au pays de Chanaan, il dressa sa tente au milieu des habitants du pays. Mais Nachor, frère d’Abram, et Tharé son père, et Lot, fils d’Aran, étaient restés à Haran avec tout ce qu’ils possédaient.

Et quand Abram fut établi en Chanaan, Jéhova lui apparut et lui dit: Ceci est le pays que je t’ai donné, pour le posséder, toi et ta postérité après toi à jamais: toutes ces régions que tu vois. Et Abram construisit un autel à l’endroit même où Jéhova lui avait parlé, et il y invoqua le nom de Jéhova.

En ce temps-là mourut Noé, dans la cinquante-huitième année de l’âge d’Abram, et après la troisième année du séjour d’Abram dans le pays de Chanaan. Et tous les jours que Noé avait vécu sur la terre furent de neuf cent cinquante ans.

Dans la cinquième année de la demeure d’Abram dans le pays de Chanaan, les habitants de Sodome et de Gomorrhe et de toutes les villes de la plaine se révoltèrent contre l’autorité de Chodorlahomor, roi d’Élam. Car depuis douze ans, tous les rois des villes de la plaine étaient assujettis à Chodorlahomor et lui payaient un tribut annuel. Et dans la douzième année de la demeure d’Abram en Chanaan, Nemrod, roi de Sennaar, instruit de cette révolte, déclara la guerre à Chodorlahomor, roi d’Élam, afin de le soumettre à sa puissance. Car Chodorlahomor avait été un de ses généraux, et lors de la dispersion de la tour de Babel, il se fit roi du pays d’Élam, et se proclama indépendant de son maître. Et Nemrod entra en campagne avec une armée de sept mille hommes qu’il avait réunis. Chodorlahomor marcha contre lui avec cinq mille combattants. Et la bataille s’étant engagée, Nemrod et son peuple furent défaits par les gens de Chodorlahomor, et il en tomba environ six cents hommes, et Mardon, fils de Nemrod, tomba aussi avec eux. Nemrod s’enfuit dans son pays, couvert de honte et de confusion, et il resta longtemps humilié sous la main de Chodorlahomor.

Cependant Chodorlahomor, revenu dans son pays, députa de ses généraux vers les rois ses voisins, Arioch, roi d’Ellazar, et Thadal, roi des nations, et il fit alliance avec eux, et les amena à son obéissance.

Dans la quinzième année de la demeure d’Abram dans le pays, qui était la soixante-dixième de son âge, Jéhova lui apparut et lui dit: Je suis Jéhova qui t’ai tiré d’Ur des Chaldéens pour te donner ce pays en possession, depuis le fleuve de l’Égypte jusqu’au grand fleuve de l’Euphrate. Quant à toi, tu seras recueilli avec tes pères, en paix, après une heureuse vieillesse. Et tes enfants, en la quatrième génération, reviendront dans ce pays pour le posséder éternellement (1213). Alors Abram édifia un autel et y invoqua le nom de Jéhova en lui offrant des holocaustes. Vers le même temps Abram revint à Haran pour voir son père et sa mère. Il s’y arrêta l’espace de cinq ans avec sa femme et tout ce qu’il possédait. Et d’autres gens de Haran s’attachèrent encore à Abram, soixante-douze hommes. Et il leur apprit à connaître Jéhova et sa doctrine.

 


Notes sur le Livre de la Genèse

1165

La tradition des rabbins dit que cette Noéma était sœur de Tubalcaïn (Voyez: Medr.-R.). Elle aurait été de beaucoup plus vieille que celle de notre livre, dont l’âge pouvait être parfaitement celui d’une fille d’Hénoch. Si le présent passage avait été fabriqué par un rabbin, il n’aurait certes pas contredit le Médrasch. La Bible ne dit pas quel était le nom de la femme de Noé.

1166

Sem, שם, de שום, mettre. Japheth, יפת, de פתה, conjug. Hiphil. étendre, répandre. La naissance de Cham manque dans notre livre.

1167

פלני אלמני, expression employée quand on ne veut pas désigner clairement.

1168

De ceux dont la loi mosaïque permet de manger ou d’offrir des sacrifices.

1169

Image frappante des damnés sans retour et de leur tardif et inutile repentir: A morte perpetua libera nos, JESU.

1170

Ainsi littéralement le texte. בסיר סכוך את הנזיד.

1171

Version judaïque, Meram.

1172

Phaleg. de פלג, disperser et diviser. Jectan, du קטן dans la conjug. Hiphil. amoindrir.

1173

La Bible lui donne, lors de la naissance de ces fils, soixante-dix ans, âge que notre livre, plus loin, ne lui donne qu’à la naissance d’Abram. Il y a en outre dans ce passage beaucoup de noms qui ne figurent pas dans la Bible, et les degrés de descendance ne s’accordent pas toujours avec ceux de la Genèse. L’ivresse de Noé est passez sous silence.

1174

Nemrod, נמרד, de מרד, se révolter.

1175

Sennaar, שנער, de נער, renverser, précipiter. Proprement, excvssio.

1176

En effet, on lit 1 Reg. 24:14: Sicut et in provcrbio antiguo dicitur, Ab impiis egredietur impietas.

1177

Abram, de אב, père, seigneur, et רם, haut, élevé.

1178

Il parait qu’Abram devait être, comme plus tard Isaac, l’unique héritier de son père.

1179

Ces âges ne concordent pas avec ceux que suppose le texte de la Bible; mais d’après notre livre Abram était effectivement plus jeune qu’Aran de trente-deux ans.

1180

À la lettre: sous son conseil. תחת עצתו.

1181

Mot sublime dont la Bible seule offre des exemples. Le texte de la Genèse dit simplement: Et Jéhova descendit pour voir la ville et la tour que bâtissaient les enfants d’Adam.

1182

Nous pensons qu’un rabbin a introduit dans notre livre ces septante anges, qu’il a été chercher dans la cabale, parce que le texte de la Bible est un de ceux qui indiquent le mystère de la T.-S. Trinité.

1183

Expression du texte, רעהו.

1184

לקופים ושנהבים, version judaïque, et le livre Hébréo-germain. Tzeéna-Uréna: Affen und Mcerka!zen.

1185

Il y a ici de la confusion dans le texte. Après les trois tiers de la tour, il parle d’une autre partie qui est restée suspendue dans l’air, et dont le circuit (le circuit de son ombre, sans doute) est de trois journées.

1186

Ce qui suit jusqu’à la fin de l’alinéa n’est qu’un lambeau du Yosiphon hébreu rapporté ici. Il ne s’accorde pas avec notre texte. Il énumère les descendants de Riphath, de Thogorma, d’Élisa, de Céthim et des Dodanim que notre texte n’a pas nommés parmi les fils de Japheth. Par contre, il ne dit rien des descendants de Magog.

1187

La Loire.

1188

Pour les noms qui suivent on ne peut que tâtonner. Le Phaleg de Bochart, savant admirable que personne n’a encore pu égaler, m’a été d’un grand secours. Cozar, sur la mer Caspienne, qu’un géographe Nubien appelle, à cause de ce voisinage, la mer Chozar.

1189

Ce nom est dans Cédrène. Les Daces. Suidas dit: Les Daces, maintenant Patzinacites, Δάκες οί νύν Πατζινακίται.

1190

Ville de la Thrace, sur le Pont-Euxin. Dans notre texte les lettres ont été transposées, אליקניס, pour אנקילוס.

1191

Bochart pense qu’au lieu de רגביב on doit lire רגוזה, Raguse, anciennement, Épidaure. Ragusi vecchio.

1192

Pomponius Méla et Pline les placent près des Palus-Méotides.

1193

Ancienne ville de la Dacie. La Napuca de Ptolomée.

1194

זבוך. Il faudrait lire peut-être זבולך, Zavolch, nom d’une race tatare célèbre, sur le Volga.

1195

Probablement la Misnie de Germanie, appelée anciennement Dalemincia.

1196

Plutôt, Éthel qui est Élatach.

1197

L’Aruo.

1198

?

1199

Les Polonais.

1200

כורה, Une autre édition porte Bura, בורה.

1201

Une partie de la France méridionale et de l’Italie était regardée comme appartenant à la Germanie, parce qu’elle obéissait à des chefs germains. Le pays d’Arles, la Provence, le Dauphiné et la Savoie.

1202

La Méditerranée.

1203

L’Adriatique.

1204

Peuple de l’Illyrie, appelé, les Bardiens, Bardæi, Βαρδαίοι.

1205

Tous noms bibliques.

1206

Babel, בבל, confusion. Arach,ארך, éloignement. Achad, אכד, prises, mêlée. Chalanné, כרנה, de la racine כלה, en finir.

1207

Le texte de la Genèse 14, appelle le roi de Sennaar Amraphel, אםרפל. La tradition dit que c’est Nemrod qui est surnommé Amraphel, parce qu’il avait ordonné, אמר, jetez, פול, Abram dans le four ardent. Voyez: Médrasch-Rabba. Ce nom peut aussi se déduire de נפל, tomber, périr.

1208

Voyez plus haut: note 1173.

1209

Ces 300 hommes avec 18 esclaves enfants de la maison, vernaculi, tous exercés aux armes, expediti, formèrent le détachement avec lequel Abram défit les cinq rois, dont l’un était précisément Nemrod-Amraphel. Voyez: Genèse 14.

Abraham sauvé miraculeusement du four ardent à Ur en Chaldée en récompense de sa foi et de son zèle pour la gloire de Jéhovah, et le motif de sa condamnation, sont une tradition de la Synagogue. Elle est consignée dans les livres anciens, la paraphrase chaldéenne de Jonathan, le Talmud, le Médrasch-Rabba, le Médrasch-Schokhertob. Elle revient souvent dans la liturgie de la Synagogue. La mort d’Aran, telle qu’elle est racontée ici, est également de la tradition constante de la Synagogue, aussi bien que le moyen employé par Abraham pour animer son père a confesser lui-même l’impuissance des idoles, en lui disant que la grande idole avait brisé toutes les autres.

1210

Version judaïque: Anuko.

1211

Non proderunt divitiœ ultionis. (Proverbes 11:4).

1212

Il est dit au livre de la Genèse 12:4, Septuaginta quique annorum erat Abram cum egrederetur de Haran. Et cependant le chiffre du Yaschar ne saurait être attribué à une des fautes d’impression dont il fourmille. Abram avait cinquante ans lorsqu’il fut jeté au four à briques. Ajoutez deux ans qui se sont écoulés depuis cet événement jusqu’au songe de Nemrod, et les trois ans du séjour d’Abram à Haran, vous arriverez précisément cinquante-cinq ans. Mais il faut considérer qu’Abram a quitté Haran à deux époques différentes, séparées l’une de l’autre par un espace de vingt ans. Voyez: le texte du Yaschar un peu plus loin.

1213

Ces mots, reviendront dans ce pays, supposent l’annonce de la servitude d’Égypte. (Genèse 15:13-14)

 

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